Mystic Marmot | Un ecolodge pas comme les autres
Il y a quelques temps, au printemps lors de mon séjour aux Sources du Lac d’Annecy, j’ai passé la nuit au Mystic Marmot chez Géraldine et Daniel qui tiennent ce gîte pas comme les autres. Tout d’abord, le Mystic Marmot c’est un ecolodge au cœur des montagnes, tenu par ce jeune couple et leur bébé où il est possible de passer la nuit ou plusieurs d’ailleurs. Cet ecolodge, c’est bien plus qu’une bonne adresse puisque Mystic Marmot c’est aussi une philosophie, un choix de vie, celui de ce couple de trentenaires. Géraldine et Daniel qui ont eu envie, en emménageant ici, de créer leur petit bout du monde en accord avec leurs convictions…Comment ? En créant justement, cet endroit qui se veut écologique et autosuffisant, loin de toute société de consommation de masse, tout en étant plus proches de la nature…
Un message et une vision de choses qui me parlent bien évidement…
Si vous me lisez régulièrement ici, vous savez que j’apporte une grande importance à l’écologie et à la préservation de la planète en général en partageant des bonnes adresses ou tout simplement des récits inspirants qui donnent envie de faire bouger les choses…
En discutant avec Géraldine, j’ai de suite eu envie de l’interviewer pour parler déjà de leur aventure mais aussi pour inspirer certains d’entre vous qui comme moi sont émus ou même encouragés par tant de bonté !
Bref cet interview est désormais tout prêt tout chaud et j’espère que son récit vous inspirera autant qu’il a été pour moi source d’espoir et d’envie !
Interview
1° Peux-tu te présenter en quelques lignes ?
Je m’appelle Géraldine, je suis de Haute-Savoie, maman d’un petit garçon de 6 mois et femme d’un grand Canadien. J’habite perdue dans la montagne où je m’occupe d’un gite autonome et écologique. Je suis aussi graphiste et travaille depuis mon chalet. Avant ça, j’ai travaillé dans le monde des ONG pour défendre la liberté de la presse et la liberté d’expression. J’aime dessiner, planter des pois, lire des BD, faire le clown, regarder les abeilles travailler, faucher l’herbe et parler des langues étrangères.
2° D’où vous est venue l’idée de vivre là haut et de construire Mystic Marmot ?
Nous avions grand besoin de retourner vivre à la campagne, de respirer l’air frais de la montagne et vivre avec des animaux. Pour la Mystic Marmot, nous avions envie de vivre en autonomie avec les énergies renouvelables, manger ce que l’on cultive, élever les animaux que l’on mange (on n’en est pas encore à cette étape). Mettre plus de sens dans nos activités quotidiennes quoi. Et puis on a eu envie d’accueillir des gens et donc d’ouvrir un gite pour partager et ne pas devenir de vieux ermites qui puent.
3° Ce choix de vie a-t-il toujours été une évidence ?
Ce choix de vie n’a pas été une évidence mais s’est construit petit à petit dans nos têtes. Nous continuons à construire le projet d’ailleurs et réfléchissons sans cesse à la direction qu’il doit prendre. Avant je voulais être interprète et chanteuse d’opéra. Maintenant je veux être bergère et apicultrice.
4° Vos voyages autour du monde ont-ils un lien plus ou moins liés à cette prise de « décision » ?
En vivant à l’étranger et en travaillant pour des ONG étrangères, je me suis petit à petit rendue compte, que si j’avais vraiment envie d’être efficace, il fallait que je retourne à la source, de là où je venais. Donc retour en Haute-Savoie en essayant de changer un tout petit bout de monde, localement et tranquillement. Pour Daniel, ses voyages en Amérique Latine lui ont donné pleins d’idées concrètes pour les constructions écologiques.
5 ° Je me souviens que tu m’as posé la question suivante : Tes parents acceptent le fait que vous voyagez autant ? À mon tour de te la poser. Quel regard portent vos parents à votre style de vie ?
Nos parents ont eu d’abord un peu peur de notre décision. Ils ne pensaient pas que notre idée pouvait marcher et ont pensé que nous nous lasserions au bout de quelques mois, isolés, dans les bois. Mais ils ont quand même accepté de nous faire confiance et c’est grâce à eux que nous avons pu créer la Mystic Marmot. Maintenant, j’ai bien l’impression qu’ils sont fiers de ce petit projet qui prend forme et se disent que notre rêve n’était pas si utopique finalement.
6° Quel est votre quotidien là haut ?
Notre quotidien varie selon les saisons. Au printemps, nous passons tout notre temps dehors à planter, planifier, améliorer, couper du bois… Par exemple, ce printemps nous avons créé deux terrasses dans la montagne où nous avons fait pousser notre potager et verger en permaculture. En été, nous essayons de nous occuper plutôt des constructions extérieures. Cet été nous avons par exemple construit une douche solaire et créé des sentiers pour randonner dans les environs. L’automne nous récoltons, cherchons les champignons, réparons et nous préparons pour l’hiver. L’automne dernier nous avons par exemple augmenté la capacité de stockage d’eau qui est passé de 2000 litres à 20 000 litres. L’hiver, nous ralentissons, restons plus à l’intérieur, descendons rarement dans la vallée et reprenons des forces pour le printemps en nous gavant de jeux de société.
Ce qui ne change pas dans notre quotidien, ce sont les hôtes qui arrivent tous les weekends et de plus en plus souvent pendant la semaine. Des gens de tout horizon et nationalité, avec qui nous aimons échanger et qui nous permettent de développer la Mystic Marmot au fil du temps.
7° Y’a-t-il des choses plus ou moins compliquées et à l’inverse plus faciles dans le fait de vivre un peu « loin » de la ville, au cœur des montagnes ? (climat/distance etc)
L’hiver est une saison plus compliquée pour nous. Entre la neige, les tempêtes et le froid, la nature devient plus hostile et nous reprenons notre statut de petit humain. Nous montons nos provisions à l’aide de pulkas (petits traineaux) que nous trainons, raquettes aux pieds. Nous déneigeons régulièrement nos panneaux solaires pour qu’ils ne soient pas dans le noir trop longtemps. Nous veillons à ce que la tuyauterie ne gèle pas et nous faisons surprendre parfois. Nous dégageons le petit chemin barré par un arbre tombé à coup de tronçonneuse… Ce qui est drôle, c’est que c’est pourtant notre meilleure saison pour accueillir des hôtes. Il faut dire que les chocolats chauds au coin du feu avec les sapins enneigés tout autour n’ont pas le même goût.
Le fait d’être isolé implique d’utiliser la voiture assez souvent, ce qui n’arriverait pas en ville où tout peut se faire en transport en commun ou à vélo. Nous essayons donc de limiter nos descentes en 4×4. Au début nous étions très strictes et nous limitions à une descente dans la vallée par semaine. Aujourd’hui nous sommes un peu plus flexibles et essayons de descendre seulement de 2 à 3 fois par semaine.
Notre mode de vie nous permet par contre d’être en contact permanent avec la nature, ce qui nous donne une force qu’on n’avait plus en ville. Nous avons aussi plus de temps à passer avec notre famille ou nos amis qui montent chez nous et restent plusieurs jours. Nous n’avons plus de factures d’eau, d’électricité ou de chauffage à payer puisque tout est produit sur place. Et puis depuis peu, nous avons un petit garçon et je pense sincèrement, dans notre cas en tout cas, qu’il est plus facile de l’élever dans les bois qu’en ville.
8° Tu nous confies un geste pas du tout écolo qui te manque ou que tu « t’autorises » encore à faire ? Ta philosophie par rapport à ça ?
C’est une question importante parce que nous sommes loin d’être parfaits et avons beaucoup de choses à améliorer. Le but n’est pas de dire : « Hey regardez-nous, nous sommes exemplaires » mais plutôt « hey nous on fait comme ça et toi tu fais comment ? ».
Alors les trucs pas écolo que nous faisons régulièrement c’est de conduire un gros 4×4 qui pollue, que nous utilisons peu, certes, mais que nous utilisons régulièrement puisque c’est le seul véhicule qui peut monter chez nous. On a le plan secret de prendre un ou deux yaks l’année prochaine pour porter les bagages des hôtes, du bois, les provisions…
L’autre chose, c’est qu’avec une belle famille canadienne, il est difficile de ne pas prendre l’avion pour aller la voir une fois par an ou une fois tous les deux ans.
Ma philosophie par rapport à ça ? J’essaie de faire de mon mieux et pour le reste, ça viendra.
9 ° À l’inverse as-tu un geste « Green » à partager ?
Je voudrais partager plutôt une mini réflexion. Souvent les gens montent chez nous et disent : « J’aimerais bien avoir un mode de vie plus écologique mais j’habite dans un 25m2 en ville ». Et je voudrais dire que c’est tout à fait possible, même voire plus facile que chez nous. Pas besoin d’habiter dans la nature pour prendre soin de son petit bout d’environnement. En ville, par exemple, on utilise les transports en commun, il est aussi plus facile de chauffer 25m2 que 2 chalets, on peut y trouver des marchés et magasins à vrac partout et il est très facile de composter, même dans un 25m2 avec un lombricomposteur.
10° Quel conseil donnerait à quelqu’un qui aimerait adopter « une vie sans déchet » mais qui ne saurait pas comment se lancer ?
Le Zéro Déchet n’est pas très sexy. Mais quand on comprend que cela fait gagner du temps et de l’argent et qu’en plus, ça fait du bien à la planète, on commence à se poser des questions.
Alors le premier geste le plus facile à adopter pour commencer une pratique « zéro déchet » c’est de coller un autocollant « stop pub » sur sa boîte aux lettres. Un tout petit geste qui réduit déjà les déchets et qui ne demande pas beaucoup d’efforts.
Ensuite, il faut y aller petit à petit, en testant ce qui convient à chacun. Le but n’est pas de se rendre la vie insupportable.
La première étape est d’apprendre à refuser. Refuser les sacs plastiques donnés dans les magasins, refuser le stylo publicitaire distribué au travail, refuser la paille dans votre verre au bar…
Ensuite on peut trouver un petit marché pas loin de chez soit et acheter fruits et légumes en les mettant dans des sacs en tissus. Pour ce qui est des graines et des céréales, on peut les trouver en vrac dans les magasins bio du coin. La viande peut être achetée chez le boucher dans des boîtes en verre, pareil pour le poisson chez le poissonnier. On peut acheter ses vêtements dans des friperies ou en faisant des trocs entre potes.
Il y a deux bouquins faciles d’accès que je recommande pour se mettre le pied à l’étrier : «Zéro Déchet » de Béa Johnson et « Famille presque Zéro Déchet, Ze Guide », de Jérémie Pichon et Bénédicte Moret.
